Une chronique signée Edouard-Jean Navez, Notaire à Wavre, Chargé de cours à l’UCLouvain Source:
Source : La Libre
Récemment, l’administration fédérale a modifié ses exigences entourant la donation de liquidités préalable à une acquisition immobilière réalisée conjointement par des parents (pour l’usufruit) et leurs enfants (pour la nue-propriété, au moyen des fonds donnés).
Une autre technique de planification successorale particulièrement populaire consiste en la donation aux enfants d’un immeuble appartenant aux parents, accompagnée d’une réserve de l’usufruit au profit des parents donateurs. La contradiction apparente entre la volonté de donner – qui implique un dépouillement – et celle de conserver le contrôle et les revenus du bien donné reflète, en réalité, le double objectif qui anime généralement les parents, à savoir : d’une part, assurer leur indépendance financière et le coût de la fin de vie ; d’autre part, réduire autant que possible le montant des droits de succession que les enfants devront supporter à leur décès. Le premier objectif peut être atteint en réalisant la donation d’un bien – meuble ou immeuble – à concurrence de la nue-propriété seulement. En se réservant l’usufruit, le parent donateur s’assure le droit d’occupation et la jouissance des revenus du bien sa vie durant. Lorsque les revenus du bien sont jugés insuffisants, il est également possible d’insérer dans la donation une charge de rente revenant au donateur à échéance régulière, que l’enfant donataire s’oblige à lui verser. De même, la donation peut être modalisée par l’ajout de clauses qui renforcent le contrôle du donateur. Est notamment visée l’interdiction faite à l’enfant donataire de sortir d’une indivision, de vendre le bien donné ou de l’apporter dans une communauté matrimoniale. Dans la donation elle-même ou dans une convention annexe, l’on peut également prévoir, au profit du donateur, tantôt un mandat de gestion discrétionnaire (utile notamment pour les portefeuilles-titres), tantôt un mandat de vente (lui permettant de décider seul de l’opportunité d’aliéner le bien donné). Le second objectif vise à réduire la facture des droits de succession. A cet égard, la donation est l’outil idéal, puisque l’impôt dû à cette occasion est généralement moins élevé que celui qui sera dû, en droits de succession, si le parent conserve ses biens jusqu’à son décès. Certes, la donation accompagnée d’une réserve d’usufruit au profit du donateur rend exigible un impôt sur la valeur totale (en pleine propriété) du bien donné. S’agissant des biens mobiliers (liquidités, produits financiers, etc.), le taux d’imposition s’élève à 3% (à Bruxelles et en Flandre) ou 3,3% (en Wallonie) entre les parents et leurs enfants. En ce qui concerne les donations immobilières, le taux d’imposition est identique dans les trois régions, et oscille entre 3% (jusqu’à 150.000€ par enfant) et 27% (au-delà de 450.000€ par enfant). Cependant, au jour du décès du parent donateur, son usufruit s’éteint automatiquement, et les enfants donataires réunissent la pleine propriété sans aucun droit de mutation à acquitter. Il reste néanmoins possible d’aménager la donation pour que l’usufruit réservé par le parent donateur soit, lors de son décès, « continué » par son conjoint jusqu’à son propre décès. Actuellement, cette possibilité peut être prévue sans charge fiscale supplémentaire, dans les trois régions du pays. Il n’en reste pas moins vrai que ces opérations sont très sensibles et techniques. Selon la région où est domicilié le donateur, la nature du bien donné, ou les spécificités du contexte familial, les enjeux civils et fiscaux peuvent fluctuer grandement. Il est donc essentiel de s’entourer de conseillers professionnels qui seront à même d’identifier les besoins et de sauvegarder les intérêts de toutes les parties.
Une chronique signée Edouard-Jean Navez, Notaire à Wavre, Chargé de cours à l’UCLouvain
Source: la Libre